Il n'y a pas à dire, certaines personnes ont la fibre artistique, et ça se voit. Quand il débarque devant moi, Anton Roman dégage quelque chose, réellement, comme une sorte de magnétisme, d'énergie propre à tous ceux qui ont goûté à la scène et n'y ont jamais renoncé. Et ce malgré les années passées dans l'ombre, comme la plupart des artistes peuplant ces pages. Mais avec aussi des moments de lumière.
Pour la première fois, une des interviews de ce blog se fait en face à face. Anton Roman habite la même région que moi, il fallait en profiter !
C'est ainsi qu'il m'accueille chez lui, dans son bureau, son lieu de travail. Avec lui, je vis un moment privilégié : j'ai l'impression d'être entré dans un monde parallèle, celui qui se situe derrière le grand rideau rouge, celui des « 80's de l'ombre » dans tous ce qu'elles ont de fascinant.
Anton Roman me fait écouter des maquettes inédites des années 80, souvent excellentes, tout en me confiant des anecdotes, dans son antre où sont affichées des photos de diverses époques ainsi que des disques, dont j'ignorais pour certains jusqu'à l'existence. Moi qui pensais avoir quasiment réuni l'intégrale d'Anton Roman au fil des ans, je découvre que je suis encore loin du compte ! L'interview s'annonce riche en surprises.
Anton Roman : Voilà, à travers ces photos, vous avez à peu près toute mon histoire.
Votre histoire musicale a débuté très tôt ! Vous avez suivi des études de musique à l'Harmonie municipale d'Hagondange, puis celle de Maizières-lès-Metz et enfin au Conservatoire National de Metz. Est-ce une passion innée ou est-elle venue de votre entourage familial ?
J'ai un frère guitariste et chanteur, Alphonse, qui m'a communiqué la passion de la musique. Il a été notamment chanteur dans les orchestres de Robert Villa, Laurent Lorenzini, les frères Forato... C'était les années 62-68, j'étais tout petit. J'ai tout de suite baigné là-dedans. Mon père me faisait déjà chanter sur la table devant tout le monde.
Comment devenez-vous trompettiste de bal et chanteur d'orchestre ?
C'est longtemps après ! J'ai d'abord fait des études, et décroché un BEP commercial. J'ai été employé de bureau pendant 13 ans, puis j'ai tenu un restaurant pendant 7 ans. Mais en parallèle, j'ai toujours fait de la musique. Dès l'âge de 14 ans, j'étais sur scène. Je suis d'abord devenu trompettiste dans le groupe Les Méphistos. Un jour, le chanteur a eu une extinction de voix. J'ai dû prendre son répertoire à la volée pour assurer la représentation. Puis j'y ai pris goût. J'ai ensuite joué dans les groupes Jean-Pierre Sauray, puis Los Caballeros. Mon plus beau groupe. On jouait régulièrement devant plusieurs milliers de personnes et on tournait beaucoup dans la région !

Qu'est-ce qui a motivé la genèse de votre premier 45 tours en solo, « Fille des rues », en 1983 ?
Mitterrand venait d'être élu et avec l'autorisation des radios libres, j'ai voulu tenter ma chance. J'ai édité ce premier 45 tours à compte d'auteur. La musique de ces premières chansons est signée Christian Jacob, qui a écrit la musique du dernier film de Clint Eastwood ! On avait enregistré 4 titres, et pour me payer les enregistrements, j'avais vendu une de mes deux voitures.
Ce premier disque est signé Tony Romano. Est-ce votre vrai nom ou est-ce déjà un nom de scène ?
Tony est le diminutif d'Antoine, mais c'est bien mon vrai nom. Je suis d'origine Sicilienne !
Sortir un disque à compte d'auteur était-il prémédité ou cherchiez-vous déjà les maisons de disques ?
Je démarchais déjà beaucoup les maisons de disques, mais sans succès...
La proximité de votre timbre avec celui de Daniel Balavoine, que vous exploitez aujourd'hui dans votre spectacle hommage à l'artiste, ne vous a-t-il pas desservi à l'époque ?
Effectivement la similitude avec Daniel Balavoine, qui marchait déjà très fort, m'a desservi. On me disait que ça ressemblait trop, que je ne correspondais pas aux attentes. Mais quand je demandais alors quelles étaient ces attentes, on me répondait : « ce qui passe à la radio ». Je ne manquais pas de dire qu'il y avait une certaine contradiction dans leurs remarques !
Comment arrivez-vous alors à signer chez Vogue l'année suivante, avec le 45 tours « Devenir femme » ?
Je faisais régulièrement des galas pour le Républicain Lorrain. Après avoir beaucoup hésité pour des raisons personnelles, j'ai enfin accepté de participer à un nouveau de ces plateaux chansons, et cette fois-là, il y avait Michel Salvati - le manager de Julie Pietri à l'époque - qui a craqué sur la chanson « Devenir femme ». Il s'en faut parfois de peu ! C'est devenu mon producteur et on a signé chez Vogue.
Quelle est l'histoire de la chanson ?
Elle m'a été inspirée pendant mes galas. D'année en année, je voyais les mêmes jeunes filles revenir, avec à chaque fois un an de plus, et une féminité de plus en plus exacerbée. Je l'ai écrite pour elles.
Quel a été l'accueil de ce disque ?
Le démarrage a été très bon ! Mon éditeur a bien porté la chanson. On en vendait 200 par jour, il a beaucoup été joué dans les juke-boxes de la région. Il y a des gens qui m'en parlent encore. Malgré ce beau démarrage, Vogue, qui n'allait pas tarder à déposer le bilan, a remercié tous ses artistes. L'histoire s'est donc arrêtée là. On en a quand même vendu 20 000 entre Thionville et Nancy. Je crois que c'était une région test. Je pense que si Vogue avait tenu, j'aurais pu aller plus loin. Vous savez, dans une carrière, j'estime que le facteur chance joue à 90%, le talent ne tient que pour 10%.
Vous avez tout de même ressorti « Devenir femme » dans une nouvelle version en 1987, dans une nouvelle maison de disques, et sous un nouveau nom, Anton Roman. Qu'est-ce qui a valu ce changement patronymique ?
C'est Polygram, la maison de disques, qui ne voulait pas de Tony Romano, car elle trouvait que ça faisait trop « bal de samedi soir ». On a réfléchi et on est tombé d'accord sur Anton Roman.
L'homonymie avec d'autres musiciens s'appelant Tony Romano n'a pas pesé dans la balance ?

Non, ça n'a pas joué. Je ne savais même pas qu'il y avait ce problème d'homonymie !
Vous semblez avoir définitivement adopté le pseudo d'Anton Roman puisqu'il ne vous a plus quitté !
Oui, car après j'ai beaucoup tourné sous ce nom, et comme les choses se sont installées ainsi je n'ai pas souhaité tout défaire. Il m'est arrivé une anecdote amusante : un jour, un couple slave est venu me voir en fin de concerts, tout excité et tout content, en me parlant dans leur langue dont je ne comprenais pas un mot, croyant que Anton Roman était un nom slave ! Je leur ai expliqué que j'étais d'origine sicilienne et ils étaient un peu déçus! (rires)
Parlant de vos origines, c'est d'ailleurs la seule exception: pour votre spectacle Sicilia Mia, que vous jouez encore actuellement, vous portez de nouveau le nom Tony Romano !
Oui, car c'est un hommage et en mémoire à mon père. Pour ce spectacle, je ne me voyais pas chanter sous un autre nom que le mien.
Quel a été l'accueil de la nouvelle version de « Devenir femme » ?
La maison de disques ne s'est occupée que du pressage et n'a pas suivi. Michel Salvati s'est retrouvé cette fois seul à produire le disque et ne pouvait pas assumer tout seul la promo. Il y a même un passage télé qu'on a dû annuler faute d'argent pour le billet ! Finalement, le disque n'est même pas sorti dans le commerce, il y a juste quelques maxi 45 tours qui ont été diffusés auprès des DJ's.

C'est ainsi qu'il m'accueille chez lui, dans son bureau, son lieu de travail. Avec lui, je vis un moment privilégié : j'ai l'impression d'être entré dans un monde parallèle, celui qui se situe derrière le grand rideau rouge, celui des « 80's de l'ombre » dans tous ce qu'elles ont de fascinant.
Anton Roman me fait écouter des maquettes inédites des années 80, souvent excellentes, tout en me confiant des anecdotes, dans son antre où sont affichées des photos de diverses époques ainsi que des disques, dont j'ignorais pour certains jusqu'à l'existence. Moi qui pensais avoir quasiment réuni l'intégrale d'Anton Roman au fil des ans, je découvre que je suis encore loin du compte ! L'interview s'annonce riche en surprises.
Anton Roman : Voilà, à travers ces photos, vous avez à peu près toute mon histoire.

J'ai un frère guitariste et chanteur, Alphonse, qui m'a communiqué la passion de la musique. Il a été notamment chanteur dans les orchestres de Robert Villa, Laurent Lorenzini, les frères Forato... C'était les années 62-68, j'étais tout petit. J'ai tout de suite baigné là-dedans. Mon père me faisait déjà chanter sur la table devant tout le monde.

C'est longtemps après ! J'ai d'abord fait des études, et décroché un BEP commercial. J'ai été employé de bureau pendant 13 ans, puis j'ai tenu un restaurant pendant 7 ans. Mais en parallèle, j'ai toujours fait de la musique. Dès l'âge de 14 ans, j'étais sur scène. Je suis d'abord devenu trompettiste dans le groupe Les Méphistos. Un jour, le chanteur a eu une extinction de voix. J'ai dû prendre son répertoire à la volée pour assurer la représentation. Puis j'y ai pris goût. J'ai ensuite joué dans les groupes Jean-Pierre Sauray, puis Los Caballeros. Mon plus beau groupe. On jouait régulièrement devant plusieurs milliers de personnes et on tournait beaucoup dans la région !


Mitterrand venait d'être élu et avec l'autorisation des radios libres, j'ai voulu tenter ma chance. J'ai édité ce premier 45 tours à compte d'auteur. La musique de ces premières chansons est signée Christian Jacob, qui a écrit la musique du dernier film de Clint Eastwood ! On avait enregistré 4 titres, et pour me payer les enregistrements, j'avais vendu une de mes deux voitures.

Tony est le diminutif d'Antoine, mais c'est bien mon vrai nom. Je suis d'origine Sicilienne !

Je démarchais déjà beaucoup les maisons de disques, mais sans succès...

Effectivement la similitude avec Daniel Balavoine, qui marchait déjà très fort, m'a desservi. On me disait que ça ressemblait trop, que je ne correspondais pas aux attentes. Mais quand je demandais alors quelles étaient ces attentes, on me répondait : « ce qui passe à la radio ». Je ne manquais pas de dire qu'il y avait une certaine contradiction dans leurs remarques !

Je faisais régulièrement des galas pour le Républicain Lorrain. Après avoir beaucoup hésité pour des raisons personnelles, j'ai enfin accepté de participer à un nouveau de ces plateaux chansons, et cette fois-là, il y avait Michel Salvati - le manager de Julie Pietri à l'époque - qui a craqué sur la chanson « Devenir femme ». Il s'en faut parfois de peu ! C'est devenu mon producteur et on a signé chez Vogue.

Elle m'a été inspirée pendant mes galas. D'année en année, je voyais les mêmes jeunes filles revenir, avec à chaque fois un an de plus, et une féminité de plus en plus exacerbée. Je l'ai écrite pour elles.

Le démarrage a été très bon ! Mon éditeur a bien porté la chanson. On en vendait 200 par jour, il a beaucoup été joué dans les juke-boxes de la région. Il y a des gens qui m'en parlent encore. Malgré ce beau démarrage, Vogue, qui n'allait pas tarder à déposer le bilan, a remercié tous ses artistes. L'histoire s'est donc arrêtée là. On en a quand même vendu 20 000 entre Thionville et Nancy. Je crois que c'était une région test. Je pense que si Vogue avait tenu, j'aurais pu aller plus loin. Vous savez, dans une carrière, j'estime que le facteur chance joue à 90%, le talent ne tient que pour 10%.

C'est Polygram, la maison de disques, qui ne voulait pas de Tony Romano, car elle trouvait que ça faisait trop « bal de samedi soir ». On a réfléchi et on est tombé d'accord sur Anton Roman.


Non, ça n'a pas joué. Je ne savais même pas qu'il y avait ce problème d'homonymie !

Oui, car après j'ai beaucoup tourné sous ce nom, et comme les choses se sont installées ainsi je n'ai pas souhaité tout défaire. Il m'est arrivé une anecdote amusante : un jour, un couple slave est venu me voir en fin de concerts, tout excité et tout content, en me parlant dans leur langue dont je ne comprenais pas un mot, croyant que Anton Roman était un nom slave ! Je leur ai expliqué que j'étais d'origine sicilienne et ils étaient un peu déçus! (rires)

Oui, car c'est un hommage et en mémoire à mon père. Pour ce spectacle, je ne me voyais pas chanter sous un autre nom que le mien.

La maison de disques ne s'est occupée que du pressage et n'a pas suivi. Michel Salvati s'est retrouvé cette fois seul à produire le disque et ne pouvait pas assumer tout seul la promo. Il y a même un passage télé qu'on a dû annuler faute d'argent pour le billet ! Finalement, le disque n'est même pas sorti dans le commerce, il y a juste quelques maxi 45 tours qui ont été diffusés auprès des DJ's.


Pendant cette période, j'ai beaucoup travaillé. En parallèle de mon restaurant, j'étais quand même beaucoup appelé sur scène, j'ai fait beaucoup de galas. J'ai enregistré un grand nombre de maquettes, avec notamment Roland Chiarello qui a succédé à Christian Jacob à la composition...
J'aimerais citer si possible tous mes collaborateurs sur mes titres: Christian Jacob, Roland Chiarello, Biagio Pupo qui ont été mes compositeurs, Jean Jacques Tribout, auteur, et Jean Marie Burgin, Didier Erard (malheureusement décédé), Jang Linster et Ab Van Goor, auteurs/compositeurs.